Considérés «commerçants non essentiels» au soir du 14 mars, certains restaurateurs ont très rapidement prouvé qu’ils pouvaient apporter une contribution positive dans la gestion de la crise du coronavirus et réinventer leur métier en mettant, les circuits courts et les produits locaux au cœur de leur modèle.
Prises dans l’urgence, ces initiatives sont riches d’enseignements et méritent d’être pérennisées demain. En même temps que la crise a mis KO le secteur, elle semble jouer un rôle d’accélérateur de tendances déjà à l’œuvre : recours à des filières alimentaires courtes et locales, solidarité contre les inégalités et les discriminations, préférence aux commerces locaux et indépendants, transparence sur la provenance des produits, soutien et mise en avant de l’agriculture paysanne, croissance des ventes des produits bio.
Une chose est sûre : les pratiques apparues pendant les 50 premiers jours de la crise ont développé dans la restauration des qualités nouvelles. Celles-ci pourraient à long terme permettre au secteur de mieux faire face à d’autres aléas, climatiques notamment. Surtout, elles confortent la restauration comme un maillon essentiel de la transition et la résilience alimentaires. Les restaurants qui se sont transformés en points de vente de produits locaux pendant la crise pourraient continuer à jouer demain ce rôle de tiers de confiance et de proximité pour faciliter les liens entre producteurs et consommateurs.
Avant la crise sanitaire, les restaurants jouaient aussi déjà un rôle clé dans la dynamisation des villes et des territoires, avec l’émergence de lieux hybrides comme les hubs culinaires et culturels tels que le Time Out Market à Lisbonne, le Ground Control à Paris ou la Halle Boca à Bordeaux. Ce rôle pourrait prendre une toute autre envergure dans le monde post-confinement où certaines villes réfléchissent à de nouveaux projets urbains faisant la part belle aux piétons, aux cyclistes … mais aussi aux terrasses des restaurants.
Des mesures pensées pour soutenir les restaurants mais qui pourraient, à plus long terme, les positionner comme des leviers clés dans la fabrique d’une ville plus apaisée.
Enfin, un dernier point, qui pourrait conduire à une réinvention du secteur : la crise, qui a mis à l’arrêt brutalement un monde où l’accélération était la règle, pourrait bien inviter certains secteurs, dont la restauration, à renouer avec le temps long. Olivier Roellinger ne s’y trompe pas, pour qui «la contrainte oblige à ralentir». Au bout du compte, la transition alimentaire et territoriale pourrait donc constituer un bon levier de relance économique du secteur…