Jusqu’à la fin des années 1990, les espaces de bureaux étaient classés en deux grandes catégories selon leur aménagement : ouverts (ou en open space…) ou bien fermés, c’est-à-dire à l’ancienne, avec des couloirs, des portes, et des noms sur les portes. Aujourd’hui, les bureaux sont dits agiles, flexibles, en activity-based, hybrides, en libre-service, ludiques, en coworking, en corpoworking, etc. La liste des qualificatifs ne cesse de s’allonger, ceux-ci suggérant généralement les modes (et les modalités) du travail, que ce soit individuellement ou en groupe/équipe.
Ce glissement sémantique reflète la fin de l’époque où l’on se contentait de distinguer les cols blancs des cols bleus, les cadres des employés, et les titulaires des intérimaires. Il s‘agissait de fournir à chaque salarié un poste de travail correspondant à sa position dans l’organigramme et à sa fonction dans l’entreprise et où, bien sûr, sa hiérarchie pourrait le surveiller et s’assurer à tout moment de sa présence et de son ardeur au travail. Les décisions en matière d’aménagement se limitaient à des sujets essentiellement techniques tels que l’infrastructure technique (informatique notamment), le type de cloisons et de mobilier ou l’éclairage.
Dorénavant, avant d’aborder ce genre de détails pratiques, les équipes de conception doivent s’assurer qu’elles partagent avec les utilisateurs une vision commune de leur environnement de travail. Il ne s’agit plus uniquement de réduire les coûts ou de choisir les couleurs les finitions et les matériaux du moment, mais de réfléchir sur des sujets tels que stratégie, objectifs, flexibilité, réversibilité, durabilité, attractivité, ergonomie, bien-être et, bien sûr, de mesurer ex post la satisfaction des collaborateurs. Un simple copier-coller d’un modèle existant ne suffit plus.
Concevoir un espace de travail est un processus de changement organisationnel et plus d’architecture et de design spatial : il est ainsi essentiel d’étudier la culture de l’entreprise, d’assimiler son identité, et prendre des paris à risque raisonnable sur les évolutions à venir de son écosystème.
Dans tous les cas, le concept d’aménagement ne peut donc plus être élaboré unilatéralement par une équipe de spécialistes si l’on entend proposer aux utilisateurs un espace qu’ils pourront s’approprier et faire évoluer au rythme de la vie de l’entreprise. C’en est fini des solutions standardisées et du mythe de l’espace de travail parfait.