Alors que nous faisons face à une crise de recrutement et de rétention d’employés sans précédent, et que l’Europe connaît un afflux de réfugiés lié au conflit ukrainien, il pourrait être tentant de réduire l’insertion des migrants à leur rôle historique en France : répondre aux besoins de main d’œuvre des secteurs délaissés par les Français en raison des horaires difficiles et des salaires limités.
Mais l’arbre peut cacher la forêt, et les réfugiés sont en réalité une opportunité bien plus riche. Car la diversité est un atout essentiel pour les entreprises, quantifié par de nombreuses études. C’est d’abord un facteur reconnu d’innovation : une entreprise plus inclusive serait ainsi en moyenne 1,7 fois plus innovante. Et c’est aussi un levier précieux de performance et d’efficacité économique : les études montrent que les équipes les plus diverses en genre mais aussi en origine ethnique ou culturelle ont respectivement 25 % et 36 % de probabilité d’avoir une rentabilité supérieure à celles qui n’ont pas investi sur ces sujets.
Plus spécifiquement dans la restauration, l’intégration de personnes réfugiées ou exilées (titulaires d’un permis de travail) suscite souvent l’enthousiasme de ceux qui les côtoient et en soulignent la grande motivation. Tigrane Seydoux explique ainsi l’engagement de Big Mamma sur le sujet, qui s’est lancé il y a 3 ou 4 ans à partir de rencontres fortuites, et a recruté une grande diversité de réfugiés (afghans, bangladais, turcs, kenyans, tibétains… et évidemment ukrainiens) : «Beaucoup ont fait des études, parlaient anglais et avaient un travail stable dans leur pays mais d’autres travaillaient en famille comme agriculteurs ou bergers – et ils ont tous en commun d’être des entrepreneurs de la vie. Ils sont partis parce qu’ils n’avaient pas le choix, ils ont dû redémarrer à zéro… Ce n’est évidemment pas le cas pour tous, mais quand ça marche, ça donne des exemples géniaux de réussite».Par ailleurs et très pragmatiquement, ces personnes aux parcours de vie souvent complexes tendent à privilégier la stabilité de l’emploi, dans un secteur où la rétention des équipes est un défi permanent.
Enfin, la richesse des profils, des parcours et des cultures est évidemment un atout face à des clients en attente de créativité.C’est ce que met en avant Refugee Food, qui propose à des chefs réfugiés de cuisiner en résidence au Ground Control à Paris, entre autres activités, ou encore Meet My Mama, qui accompagne des femmes réfugiées ou issues de l’immigration dans leur parcours pour devenir chef. Ces initiatives ont évidemment une dimension solidaire fondamentale, mais elles permettent aussi de célébrer la diversité des saveurs !