La révolution silencieuse
Rappelons qu’à fin juillet 2023, soit exactement 4 ans après la publication du décret et plus de 9 mois après l’échéance déjà reportée d’un an de déclaration des consommations de 2020 et de 2021, seulement un gros tiers des consommations des bâtiments était correctement renseigné dans la base de données OPERAT
Heureusement, même s’ils font le plus de bruit, les mauvais coucheurs ne sont pas les plus nombreux. Les optimistes voient au contraire dans ces résultats a priori décevants un formidable succès.
Même si les données vont nécessiter sans doute une année, voire plus, pour être complétées, recalées, reprises, rectifiées, ce qu’elles ont permis de savoir est déjà fantastique : pour l’année 2021, la consommation moyenne relevée pour près de 559 millions de m2 déclarés serait de 160 kWh d’énergie finale par an et par m2. C’est exactement le même chiffre que celui qu’a annoncé l’excellent OID pour la même période, mais sur la base de seulement 54 millions de m2 de bâtiments tertiaires (ce qui était déjà une gageure). Si ce chiffre est bien vérifié, cela signifierait que la méthode employée était la bonne.
On saurait alors identifier et classer le parc de bâtiments tertiaires français. On saurait qui l’occupe, pour quel usage et, finalité des finalités, on saurait combien il consomme énergie par énergie, usage par usage et, excusez du peu, non pas d’une manière statistique, comme cela était fait approximativement jusqu’alors mais à partir de consommations réelles car correspondant aux factures.
Pour des gens comme moi qui rêvaient déjà de connaître, en préparation du Grenelle de l’environnement, la consommation réelle du parc tertiaire français, nous assistons ici à un progrès phénoménal dans la mesure. Et qui dit mesure dit pilotage et travaux, conduisant à la maîtrise éclairée des consommations.
Cerise sur le gâteau, les équipes de l’ADEME, de la DGALN et de la DHUP ont réussi l’incroyable : à savoir obtenir l’accord de la profession, à grand renfort de consultations et autres webinaires, sur les valeurs de seuil de consommation modulables en fonction de l’usage, et ce pour des activités tertiaires représentant déjà 70% du parc.
Cela a bien sûr pris beaucoup plus de temps que prévu, d’où les retards accumulés, mais les résultats sont là. De véritables plans d’action vont enfin pouvoir s’engager, rapidement, à différentes échelles, car ils s’appuieront sur des informations réelles et documentées et non plus statistiques.
Que représente un retard d’un an, voire de deux, s’agissant d’un outil qui, n’en doutons pas si sa cohérence est confirmée, survivra allègrement à l’échéance de 2050 qu’il s’était fixé ?
Alors, faisons preuve d’indulgence. Envers nous-même, envers l’administration. Et laissons un peu de temps aux retardataires, obligés comme demandeurs, en leur mettant quand même une pression amicale. Rome ne s’est pas faite en un jour. La révolution des consciences énergétiques non plus.