Que celles et ceux qui se sont un jour frottés sans difficulté à un texte réglementaire lèvent la main! C’est bien connu, les arrêtés, les décrets ou les ordonnances sont plutôt réputés pour leur opacité, et ce dans bien des pays. Justement, savez-vous à qui le ministère de l’Agriculture, de la Forêt et de la Pêche du Japon fait- il appel depuis avril dernier pour rendre les textes de réglementation du pays plus accessibles ? ChatGPT! Son rôle ? Simplifier et mettre à jour les marches à suivre des demandes de subvention ou d’aide publique.
Si cette information a de quoi surprendre, sachez qu’ici, en France, ChatGPT a déjà infiltré notre administration : depuis le 2 octobre, mille agents volontaires sont désormais assistés par trois modèles d’IA générative (ChatGPT, LLaMA et le français Bloom) pour répondre plus rapidement et efficacement aux dizaines de milliers de questions que posent chaque année les Français à l’administration.
À la clé, moins de travail fastidieux pour les fonctionnaires, qui n’ont plus qu’à contrôler les réponses proposées par les chatbots et peuvent se concentrer sur des tâches à plus forte valeur ajoutée. « L’IA va forcément transformer les interactions entre les usagers et les administrations », affirmait en mai dernier l’entourage de Stanislas Guerini, ministre de la Fonction et de la Transformation publiques, lors de l’annonce de l’expérimentation. Selon son ministère, l’administration ne doit pas subir, mais «s’approprier» l’IA et la « transformer pour qu’elle corresponde aux attentes des agents et des usagers». Car selon lui, c’est du «gagnant-gagnant» : «13,8 % de gain de productivité, avec une augmentation de la satisfaction des usagers, mais aussi une meilleure adhésion au travail de la part des employés » (1).
En réalité, cette incursion de l’IA dans nos administrations est loin d’être une nouveauté. Depuis 2018, on ne compte plus les initiatives lancées par le LabIA de la Dinum ou encore au sein de la Fabrique numérique des ministères sociaux. Des projets qui ne manquent pas de susciter des inquiétudes, notamment en matière de sécurité, de protection des données… et ChatGPT n’a pas encore apporté de réponse à cette problématique.
(1) Réponse apportée en séance publique le 19 juillet 2023 par le ministère de la Transformation et de la Fonction publiques (publiée dans le JO Sénat le 20 juillet 2023).