Combien de fois vous a-t-on dit «bon courage», comme si vous partiez à la guerre au lieu d’aller travailler ? Vous ne comptez plus.
Faites le test de l’ascenseur en arrivant au bureau le matin. À chaque étage, tous les salariés se souhaitent mutuellement «bon courage», comme si une véritable épreuve les attendait chaque jour à la sortie.
Le phénomène ne s’arrête malheureusement pas aux portes de l’entreprise. Pas un lieu, un moment, occasion, milieu social où ne soit prononcé en boucle ce funeste encouragement.
Révélateur de la morosité ambiante, c’est un excellent indicateur des maux dont souffre notre pays. Certitude qu’il n’y a rien de bon ni de très excitant à attendre d’un avenir anxiogène. Refus de voir dans le travail ou la vie en général une source d’épanouissement, de créativité et de plaisir. Absence d’exemplarité des élites et des dirigeants qui exigent des autres le respect de règles et de valeurs auxquelles certains de leurs représentants s’avèrent incapables de se plier. Manque de courage des managers qui ne font pas l’effort de déceler l’ennui ou la routine au sein de leurs équipes et refusent de prendre les mesures appropriées dès qu’elles sont douloureuses. Rupture du lien de confiance entre salariés et patrons.
Mais le plus révélateur dans cette nouvelle façon de se saluer ou de se dire au revoir me paraît être l’absence de grands projets à partager, que ce soit au sein des entreprises ou de la société civile. Nous avons tous besoin de lendemains à bâtir.
Aussi à partir d’aujourd’hui, réapprenons à dire «bonne journée», soyons attentifs à tous les signaux qu’émettent les gens et interdisons-nous pour toujours de souhaiter «bon courage» à qui que ce soit.